Hiroshima-Nagasaki: 78 ans après, une question toujours d’actualité.

La question du nucléaire militaire revient dans le débat public au moment du 78 eme anniversaire des bombardements d’Hiroshima et de Nagasaki. Les 6 et 9 aout 1945 ils firent des milliers de victimes dont beaucoup sont mortes des suites des radiations.

Le film Oppenheimer montre l’accélération du programme Manhattan mené aux USA par Oppenheimer afin de mettre au point la Bombe atomique qui anéantira les deux villes de Hiroshima et de Nagasaki et mettra officiellement un terme à la seconde guerre mondiale.

En exprimant les doutes de l’inventeur de la Bombe au regard de ce qu’il a mis au point, ce film est un avertissement politique vis à vis du pouvoir dévastateur de la Bombe

La guerre en Ukraine

La guerre en Ukraine est l’illustration des risques de l’utilisation de l’arme nucléaire comme solution à la résolution d’un conflit , que cette utilisation soit tactique, limitée ou de plus grande ampleur;.

 Jeudi 3 août, une centaine de journaux médicaux à travers le monde, “dont les plus prestigieux, ont lancé rare appel commun à agir de manière urgente pour éliminer les armes nucléaires, jugeant la menace d’une catastrophe nucléaire « importante et grandissante ». Qui entendra le message?

Voir le détail:

https://savoie-antinucleaire.fr/2023/08/03/appel-commun-contre-une-menace-nucleaire-grandissante/

Le japon et le nucléaire

Pour contextualiser la situation du Japon, Cecile Asanuma Brice sociologue au CNRS, propose une mise en perspective historique du nucléaire civil et militaire au Japon.

Cécile Asanuma-Brice (CNRS) est l’autrice de Fukushima, 10 ans après. Sociologie d’un désastre (éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2021) et co-dirige l’IRP CNRS Mitate Lab. Post Fukushima Studies.

https://www.aphg.fr/Le-Japon-et-le-nucleaire?fbclid=IwAR082pVADjU61rETx7kGoicnkr11Ik3phrxe5hdHjOgQ8Hhj1_APZJAQyrY

77 ème anniversaire des bombardements atomiques d’Hiroshima et Nagasaki

Communiqué du CRILAN du 10 août 2022

Au moment où nous commémorons les bombardements des 6 et 9 août 1945 à Hiroshima et Nagasaki, le risque de voir le désastre nucléaire n’a jamais été aussi important. C’est ainsi qu’Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations Unies alerte : « aujourd’hui, l’humanité n’est qu’à un malentendu, à une erreur de jugement de l’anéantissement nucléaire », en ouverture de la conférence qui réunit les 191 Etats qui ont signé le traité de non prolification nucléaire.

Rappelons que le traité d’interdiction des armes nucléaires ( TIAN) est également entré en application et que bien entendu aucun pays possédant l’arme nucléaire ne l’a ratifié. La France comme les autres est dans l’illégalité aux yeux des Nations Unies. Elle participe à l’escalade dangereuse sous couvert de modernisation de ses équipements.

Les tensions internationales actuelles peuvent dégénérer en conflit généralisé, provocant la destruction de la vie humaine sur terre. Est-il utile de rappeler les points de tension susceptibles d’embraser la planète ? :

  1. L’Iran n’a pas renoncé à se doter de l’arme nucléaire, tout comme la Corée du nord qui pense qu’elle assurera sa sécurité,
  2. La tension à Taiwan avec la Chine qui déploie ses forces dans la région.
  3. Le conflit en Ukraine et le chantage nucléaire de la Russie a remplacé la simple dissuasion. L’utilisation de la centrale nucléaire de Zaporizia dans le conflit, fait en plus courir un risque d’accident majeur.

« Nous avons été extrêmement chanceux jusqu’à présent » observait Antonio Guterres « mais la chance n’est pas une stratégie pour empêcher les tensions géopolitiques de dégénérer en conflit nucléaire ». Il ajoute, « éliminer les armes nucléaires est la seule garantie qu’elles ne soient jamais utilisées » ;

C’est possible à condition de le vouloir. Le CRILAN souhaite que la conférence des Nations Unies prenne des mesures à la hauteur des périls et sache convaincre les Etats nucléarisés de l’intérêt pour tous d’ appliquer le principe de précaution.

La dissuasion nucléaire face à la pandémie et à la relance de l’escalade mortifère

Communiqué du 27 juillet 2020

La France fait partie avec les USA, la Grande Bretagne, la Russie et la Chine des 5 pays disposant officiellement de l‘arme atomique. Quatre autres en seraient possesseurs : Inde, Pakistan, Corée du Nord, Israël.

Le mardi 31 mars 2020 en pleine période de confinement, alors que le pays tout entier évite la propagation de la contamination, que de nombreuses personnes sont privées de revenus, quand d’autres doivent travailler avec de faibles moyens de protection (activités indispensables), le gouvernement n’hésite pas à engager les forces aériennes stratégiques pour une simulation de frappe nucléaire, un exercice militaire comme si de rien n’était. Une dépense indispensable quand les hôpitaux manquent de tout ?.

C’est Macron qui parle de guerre au sujet du virus et pour cette soi-disant guerre, la dissuasion nucléaire se révèle bien inutile !

Le budget militaire et particulièrement celui consacré à la dissuasion nucléaire est plus encore que d’ordinaire sur doté et son maintien à son niveau actuel est moralement inacceptable.

La valse des milliards

Chaque année la France dépense près de 5 milliards d’euros pour la modernisation et le renouvellement des arsenaux nucléaires. Plus encore la loi de programmation militaire prévoit de doter les forces nucléaires françaises sur la période 2019-2025 de 37 milliards d’euros, soit 20 milliards de plus que sur la période 2003-2008, et 60% d’augmentation ; ce qui porterait la dépense annuelle à 6 milliards d’euros en 2023.

Avec les 4,7 milliard d’euros de la seule année 2019 il serait selon l’ICAN (International Campaign to Abolish Nucléar weapons , possible de financer:

  • 100 000 lits de soins intensifs,
  • + 10 000 ventilateurs
  • + 20 000 infirmières
  • + 10 000 médecins

Ces sommes ne tiennent pas compte d’autres dépenses de l’armée ou civiles comme la gestion des déchets nucléaires léguée aux générations futures.

Pourtant l’efficacité de cet argent englouti n’est pas démontrée tout comme la stratégie de dissuasion nucléaire (les dépenses militaires mondiales se seraient élevées à 1917 milliards en 2017 selon le Mouvement de la Paix).

En quoi la bombe nous protège-t-elle des actes terroristes, des pandémies, du dérèglement climatique, de la perte de biodiversité, qui sont pourtant aujourd’hui des menaces, bien réelles, à côté du risque de conflit armé généralisé bien peu probable ? La catastrophe sanitaire d’aujourd’hui qui touche le monde entier est bien peu de choses à comparer avec les effets d’une catastrophe nucléaire militaire.

La doctrine de la dissuasion nucléaire questionnée

Sur la scène internationale aussi, la tendance n’est plus au ralentissement du nucléaire militaire et c’est très inquiétant. Bien qu’ils aient été arrêtés depuis le 29 septembre 1992 les Etats Unis envisagent de reprendre des essais nucléaires afin de renforcer l’arsenal des armes nucléaires (selon le Washington post). L’administration Trump accuse en effet la Chine et la Russie de procéder à des essais nucléaires de faible puissance.

Dans ce contexte les américains n’excluent pas de reprendre des essais et équipement d’ogives de faible puissance (le tiers de la puissance de la bombe larguée sur Hiroshima) sur des sous-marins et pour une réponse rapide : on est donc loin de la dissuasion. L’administration Trump annonce en effet ne pas chercher à obtenir la ratification du traité d’interdiction des essais nucléaires, signé par les Etats Unis mais non ratifié par la Chine, l’Inde, le Pakistan et la Corée du nord ; contrairement à la Russie, la France et la Grande Bretagne qui l’ont fait.

A cette volonté américaine de doper l’arsenal des armes nucléaires, s’ajoute le choix de s’affranchir des traités limitant la course aux armes nucléaires notamment l’accord « ciel ouvert » signé en 1992 et entré en vigueur seulement en 2002. En effet les américains se sont également retirés de l’accord sur le nucléaire Iranien en 2018 et de celui sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI). Il en est de même pour les autres traités sur les missiles terrestres signés avec les Russes. Qu’en sera-t-il des accords START de réduction des armes stratégiques qui doivent prendre fin en février 2021 Seront-ils reconduits?

Printemps tragique

Ce printemps se sont succédé des évènements qui mettent à mal la stratégie française de dissuasion nucléaire.

Comble de l’efficacité de cette stratégie de défense française, le porte avion Charles De Gaulle, pièce maîtresse de la stratégie nucléaire française, n’est plus opérationnel à cause … non pas d’un manque de moyens, mais du Covid 19….la bonne blague !!!

Au moment où le sous-marin SNA Suffren commence ses essais difficiles à la mer par un retour en cale sèche, le SNA Perle dernier de la série Rubis à propulsion nucléaire vient d’être victime d’un grave incendie. Intervenu pendant les travaux périodiques de la Perle à Toulon cet incendie rend son avenir incertain et fragilise le dispositif militaire.

Le jour d’après a de fortes chances de ressembler aux jours d’avant pour que rien ne change….

Ces difficultés n’empêchent pas la France d’envisager un deuxième porte avion de type Charles De Gaulle pour au moins 5 milliards d’euros et 220 millions par an de fonctionnement.  

Le 12 juin 2020 les essais du missile nucléaire M51 ont repris à partir du sous-marin nucléaire lanceur d’engins (SNLE) Le Téméraire qui a tiré un missile balistique stratégique (sans charge nucléaire) à 120 millions d’euros depuis le large du sud-Finistère,

L’orientation du Livre Blanc de la Défense préconise de dépenser 100 milliards d’euros en 15 ans pour le renouvellement de la flotte des SNLE-NG en violation du traité de non-prolifération.

En consacrant autant d’argent au mépris des besoins de la population, la France s’entête dans une stratégie de défense remise en question par les autres pays. Pour preuve, en février dernier, Macron a considéré que la composante aéroportée pourrait mettre en œuvre à partir de 2035 un missile hypersonique emporté par un avion de combat, un porteur lourd ou un drone furtif.

En refusant d’adopter le traité d’interdiction des armes nucléaires (TIAN) alors que 122 pays l’ont fait, la France encourage la course mondiale aux armements.

Un mauvais signe pour la paix et l’avenir de l’humanité à la veille du 75ème anniversaire des bombardements atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki.

Patrick Lafon

Membre du CA du CRILAN