Le voyage des Clis de la Manche en Finlande prévoit une visite du site Onkalo. Ce site d’enfouissement profond fait penser à celui qui est envisagé en France à Bure et qui est fortement contesté. Retour sur le film Into Eternity. Helsinki 26 novembre 2019
La bande annonce d’Into Eternity:
Into Eternity est un film documentaire coproduit par le Danemark, la Finlande, la Suède et l’Italie, réalisé par le Danois Michael Madsen, sorti en 2010 au Danemark. Le film traite du stockage en couche géologique profonde de déchets radioactifs au complexe d’Onkalo, en Finlande. Wikipédia
Into Eternity : le docu radioactif
Sorti en 2011 en France, ce documentaire est éclairant. Réalisé par le Danois Michael Madsen, il nous offre une plongée dans l’univers d’Onkalo, en Finlande, où seront stockés les déchets radioactifs pour une durée d’au moins 100 000 ans. Une belle inspiration.
Il y a 5 000 ans, les Egyptiens construisaient des tombeaux pour l’éternité : les pyramides. Aujourd’hui, les hommes bâtissent un sanctuaire pour inhumer des reliques bien plus dangereuses que des pharaons : des déchets radioactifs. Cela se passe à Onkalo, au nord-est d’Helsinki, dans une steppe balayée par les vents glacés. Ou plutôt sous la steppe, à 500 mètres de profondeur. C’est là, enfermés dans une couche de granit, que l’Etat finlandais a décidé de faire reposer « pour l’éternité » les résidus radioactifs de son industrie nucléaire. Voilà l’objet de l’étonnant documentaire de Michael Madsen, jeune réalisateur danois qui s’est intéressé aux grandes questions métaphysiques que pose un tel dispositif.
Penser l’avenir à 100 000 ans
Madsen se débarrasse assez vite des questions pratiques. A peine se sert-il d’une animation 3D pour permettre au spectateur de visualiser les kilomètres de tunnels qui serviront à accueillir les déchets pour encore un siècle, avant qu’on ne ferme la porte pour toujours derrière soi. Sa curiosité tient de la métaphysique. Que signifie penser l’avenir à 100 000 ans ? Qu’est-ce que cette « chambre mortuaire » destinée à renfermer un « feu qui ne s’éteint jamais » ? Comment exhorter les générations futures à se « souvenir d’oublier » qu’un endroit pareil existe ? Faut-il les prévenir ? Et si oui, par quel truchement ? En quelle langue ? A l’aide de quels dessins (quels « marqueurs » ?).
En à peine plus d’une heure, Into Eternity pose des questions radicales qui ne trouvent pas vraiment de réponses. Nul ne sait à quoi ressembleront les hommes dans 100 000 ans, ni s’il faut leur faire confiance. Une seule chose est certaine : si la surface de la terre est instable par essence (les guerres, les catastrophes naturelles, les crises…), ses cavités offrent la stabilité. Le stockage profond est la solution pratique, immédiate, quoiqu’insatisfaisante, à un enjeu réel : à la surface, les déchets sont potentiellement dangereux à échéance de 10, 20, au mieux 100 ans. Sous leur armure géologique, ils seront protégés des caprices de la nature, et plus encore des hommes.
Domestiquer l’énergie
A travers des interviews d’experts, ingénieurs, théologiens, politiques, ce film à la voix lancinante, froid mais intelligent, est un appel bienvenu à l’humilité : à l’heure qu’il est, l’espèce humaine s’est crue maîtresse de l’univers en domestiquant l’énergie la plus formidable de tous les temps. Mais elle n’a pas songé à la suite. La voici désormais prise au piège de ses propres rêves d’omniscience. « De toute façon, conclut l’une des protagonistes, un jour ou l’autre nous arriverons à court d’uranium, il faudra trouver autre chose. » En attendant, la « cachette » d’Onkalo restera sans doute dans mille siècles l’unique vestige de notre civilisation disparue.
A Bure le stockage profond des déchets Haute Activité Vie Longue est contesté en raison de sa non réversibilité et des risques d’incendie comme aux USA.